TAXONOMIE : vers une strandardisation du calcul de l'impact environnemental
ISR, FNG-Siegel, LuxFLAG ESG, Umweltzeichen, Nordic Swan Ecolabel, LuxFLAG Environment, LuxFLAG Climate Finance, Label Greenfin. Ces 8 labels sont des labels qui certifient la prise en compte des enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans la gestion d’une activité financière. Il peut s’agir de labels publics ou privés, au niveau national ou européen. Au-delà de leur multiplicité, ils ne reposent pas sur les mêmes critères d’éligibilité des activités et donc génèrent une asymétrie d’information pour définir un impact écologique d’une part et le quantifier d’autre part. Cette asymétrie profite à la confusion, favorise le greenwashing et fait craindre aux investisseurs le maquillage de certaines technologies en solutions durables. Or les besoins de financement pour atteindre les objectifs climat de l’UE sont estimés à environ €200 Milliards/an.
Pour endiguer ce manque de fiabilité, et gagner la confiance des investisseurs l’Union Européenne a demandé à un groupe d’experts techniques (GET) d’établir un cadre référentiel standardisé : « La taxonomie européenne d’activités durables est un référentiel qui permet aux investisseurs et aux entreprises d’identifier les secteurs qui génèrent des bénéfices environnementaux ».
La volonté de standardisation qui ressort du Rapport technique sur la taxonomie remis à la commission par le GET repose sur trois grands piliers : des objectifs communs, des principes clés clairement énoncés, et une homogénéisation des définitions
MESURER
Le premier objectif de la Taxonomie verte est de construire un nouveau système métrique autour de l’appréhension des activités économiques avec un impact écologique. Construire un système de mesure commun et standardisé permet de comparer des données entre elles, mais aussi d’évaluer leur progression individuelle avec une certaine profondeur historique.
ORIENTER
Disposer d’un système métrique standardisé signifie que l’impact écologique des activités observées est quantifiable. Par conséquent une cartographie des enjeux d’investissement est disponible, laquelle permet aux autorités de savoir vers quelles activités orienter les efforts : renforcement des mesures incitatives, communication, financement…
RASSURER
Enfin, en construisant la Taxonomie verte la Commission Européenne espère offrir aux investisseurs un cadre homogène et lisible pour faciliter leur prise de décision. Les investisseurs institutionnels pourraient ainsi accélérer leur rythme d’investissement sans perdre de temps à déterminer la fiabilité des impacts climatiques des activités soutenues financièrement. Les investisseurs privés quant à eux, plus sceptiques notamment à cause du risque de Greenwashing, devraient dépasser leur frilosité s’ils sont rassurés. Or pour satisfaire aux ambitions climatiques européennes à 2050, le besoin d’investissements taxonomiques se chiffre à près de €200 Milliards par an, contre €60 Milliards d’investissements effectifs en 2018.
PRINCIPES
L’approche du GET est une matrice analytique qui croise les principaux secteurs économiques et les enjeux environnementaux majeurs afin de définir les principes du développement taxonomique. Pour cela le GET s’appuie sur la définition de la NACE (Nomenclature des Activités Économiques dans la Communauté Européenne) qu’il affine avec d’autres catégories, notamment définies par le GICS (Global Industrial Classification System)
Une activité économique ne peut pas être considérée comme durable d’un point de vue environnemental indépendamment du système plus large dans lequel elle opère. Pour contribuer substantiellement aux objectifs environnementaux, les aspects critiques d’un système doivent être décarbonisés et rendus résilients. Cela peut couvrir les ressources utilisées, les processus de transformation entrepris et l’infrastructure qui sous-tend ces systèmes.
En général, les investisseurs peuvent financer des entreprises ou des projets individuels plutôt que des systèmes. L’approche de développement de la taxonomie vise donc à identifier les activités qui apportent une contribution substantielle à elles seules, mais qui permettent également la transition globale de systèmes critiques tels que les systèmes d’énergie, de transport, d’eau et d’alimentation.
Le GET a donc jugé utile d’adopter les concepts suivants pour examiner les activités économiques, établir des critères de sélection et déterminer les types de financement qui pourraient être considérés comme admissibles à la taxonomie :
Définition des activités économiques
La liste des principes taxonomiques déduite plus haut permet de définir l’éligibilité d’une activité économique à la taxonomie. Pour cela elle doit contribuer au moins à l’un des 6 principes suivant, sans contrevenir aux 5 autres :
- Atténuation des changements climatiques
- Adaptation aux changements climatiques
- Utilisation et protection durables de l’eau et des ressources marines
- Transition vers une économie circulaire, prévention des déchets et recyclage
- Prévention et contrôle de la pollution
- Protection des écosystèmes sains
De plus les GET propose de définir des seuils, notamment sur l’intensité carbone d’une activité pour statuer sur l’éligibilité d’une activité :
- Activités déjà faibles en carbone. Déjà compatibles avec une économie sans carbone en 2050
- Activités qui contribuent à une transition vers une économie sans émissions nettes en 2050, mais qui ne fonctionnent pas actuellement à ce niveau.
- Activités qui permettent les deux premières.
Définition des critères de sélection
Les critères de sélection retenus permettent de répondre à une triple exigence :
- L’activité économique réduit tous les risques physiques matériels liés au climat dans la mesure maximale du possible
- L’activité économique ne nuit pas aux efforts d’adaptation des autres
- L’activité économique a des résultats liés à l’adaptation qui peuvent être définis et mesurés à l’aide d’indicateurs adéquats.
Définition des financements admissibles
Les participants au marché financier devraient déclarer l’information selon laquelle leur activité économique répond aux critères d’écologie durable. La Commission européenne serait habilitée à élaborer des actes délégués afin de préciser davantage les informations requises, la taxonomie devrait alors permettre aux investisseurs d’identifier :
- Le pourcentage de participations dans des sociétés exerçant des activités économiques écologiquement durables.
- La part de l’investissement qui finance les activités économiques durables sur le plan environnemental en pourcentage de toutes les activités économiques.
Du point de vue des entreprises il convient de :
- Indiquez les activités menées par l’entreprise qui pourraient être admissibles
- Pour les activités admissibles, vérifiez si l’entreprise satisfait aux critères de sélection
- Vérifiez si l’émetteur satisfait aux exigences du DNSH (Doing No Significant Harm)
- Effectuez les vérifications pour respecter les garanties sociales minimales
- Assurer la cohérence des investissements avec la taxonomie et préparer les déclarations financières
La capacité pour un acteur financier d’accéder à la data financière dépend de :
- Le type de produit financier
- Le nombre d’activités exercées par l’entité
- L’accessibilité et la qualité des déclarations des entités
- La relation avec l’émetteur ou l’entité
Ainsi la place de la data et de sa gestion est centrale et absolument fondamentale dans le processus de mise en œuvre de la taxonomie. La taxonomie pleinement fonctionnelle est indissociable d’une qualité accrue de la data et des reportings dédiés.
CONCLUSION
La taxonomie standardise l’identification les activités économiques contribuant de manière substantielle aux objectifs de lutte contre le changement climatique dans des secteurs sélectionnés représentant 93,2% des émissions de GES, ainsi qu’une proportion importante du PIB et de l’emploi total au niveau de l’UE.
La taxonomie devrait présenter des avantages pour les acteurs des marchés financiers, en particulier les banques et les assureurs, en facilitant l’identification des actifs durables et, partant, l’intégration des facteurs de durabilité dans leurs décisions d’investissement. Les principaux coûts découlant de la mise en œuvre de la taxonomie concernent la collecte et la gestion des données nécessaires pour évaluer la conformité aux critères de sélection définis.
Les consommateurs de détail bénéficieront d’une transparence accrue, d’un accès plus facile aux produits écologiques (avec un risque réduit de « green washing ») et d’une meilleure comparabilité.
Enfin, les régulateurs et les superviseurs pourraient tirer parti de la taxonomie pour mettre en œuvre de nouveaux cadres d’investissement vert à moindre coût. Les impacts réels peuvent varier considérablement en fonction de plusieurs facteurs, de l’adoption de mesures réglementaires connexes (par exemple, l’intégration obligatoire des considérations ESG dans le processus d’investissement et de conseil) et du niveau d’appropriation de la taxonomie par le secteur privé dépendant aussi de sa convivialité et de son dynamisme.
Bastien Tardé
Senior Consultant – AiYO Group